Jaroslav Kaczynski and other Polish politicians Krystian Maj/ZUMAPRESS.com

Pourquoi le concept de « démocratie antilibérale » pose problème

PRINCETON – En se tournant vers un régime autoritaire, la Pologne a tiré la sonnette d'alarme aux quatre coins de l’Union européenne et de l'OTAN. Depuis son arrivée au pouvoir en octobre, le parti Droit et Justice (PiS) de Jaroslaw Kaczynski a attaqué la Cour constitutionnelle du pays, politisé le pouvoir judiciaire et la fonction publique et a lancé un assaut à l’encontre du pluralisme des médias.

Les critiques du gouvernement PiS, qui est dirigé par le Premier ministre Beata Szydło (avec Kaczyński, au pouvoir depuis les coulisses puisqu’il ne détient aucun poste officiel), ont décrit ses actions comme une attaque éclair pour installer une « démocratie antilibérale », semblable à ce que le Premier ministre hongrois Viktor Orbán a fait dans son propre pays au cours des six dernières années. Or, il est profondément trompeur d’appeler le processus en cours de construction en Pologne « démocratie antilibérale » – et cela amoindrit les efforts pour freiner les autocrates en puissance comme Kaczyński et Orbán. Après tout, ce n’est pas seulement le libéralisme qui est visé, mais la démocratie elle-même.

Le concept de « démocratie antilibérale », attribuable à un essai de 1997 par le penseur de la politique étrangère américaine Fareed Zakaria, était un effort pour décrire les régimes qui tiennent des élections, mais ne respectent pas le règne de la loi et contreviennent régulièrement aux contrôles constitutionnels de leurs systèmes politiques. C’est une idée née de la désillusion. Dans les beaux jours après la chute du communisme, une sorte d'extase démocratique a prévalu (au moins en Occident). La « fin de l'histoire » avait été atteinte ; les élections, les institutions représentatives et l'état de droit iraient, semblait-il, toujours parfaitement ensemble.

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