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Pour un réajustement de la politique budgétaire et fiscale

CAMBRIDGE – La remontée marquée des taux d'intérêt à laquelle ont procédé récemment la Réserve fédérale américaine et la Banque centrale européenne suggère que les responsables de la politique monétaire sont fermement décidés à maîtriser l'inflation. Mais où sont passés tous ces commentateurs qui affirment depuis des années que la politique budgétaire (en général ils entendent par là les dépenses qui creusent le déficit) doit jouer un rôle bien plus important dans la gestion du cycle des affaires ? S'il est compréhensible de recourir à la fois à des mesures monétaires et budgétaires face à un ralentissement économique, pourquoi les banques centrales se retrouvent-elles soudain toutes seules pour organiser un atterrissage en douceur, alors que l'inflation est à son plus haut depuis 40 ans ?

Avant la crise financière mondiale de 2008, on considérait la politique monétaire comme le principal outil de gestion du cycle des affaires, la politique budgétaire jouant seulement un rôle d'appoint, sauf en cas de guerre ou de catastrophe naturelle comme une pandémie. Lors d'une crise systémique, on considérait qu'il fallait d'abord recourir à des mesures monétaires, suivies peu après par des mesures budgétaires appelées à les remplacer. La fiscalité et les dépenses publiques sont des questions très politiciennes, mais les pays qui réussissaient sur le plan économique savaient quoi faire en cas de crise.

Néanmoins, lors de la dernière décennie, l'idée selon laquelle la politique budgétaire devait également jouer un rôle plus important pour stabiliser l'économie en temps normal s'est répandue. Cette évolution est due en partie au fait que les taux d'intérêt des banques centrales se sont heurtés à la limite du taux d'intérêt zéro. (Certains, dont moi, estiment que cette idée ne prend pas en compte les moyens relativement simples et efficaces pour parvenir à des taux négatifs - je ne m'y attarderai pas ici). Mais la limite du taux d'intérêt zéro n'était pas, loin s'en faut, le seul argument.

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