Les responsables des banques centrales en état de siège

CHICAGO - Pauvre Ben Bernanke ! En tant que Président du Conseil d'administration de la Réserve Fédérale des États-Unis, il est allé plus loin que n'importe quel autre responsable de banque centrale ces derniers temps, dans ses tentatives de stimulation de l'économie par la politique monétaire. Il a réduit de manière drastique les taux d'intérêt à court terme. Il a adopté de nouvelles méthodes innovantes d'assouplissement de la politique monétaire. À plusieurs reprises il a répété qu'à condition que la tension inflationniste reste sous contrôle, son souci principal était le niveau élevé de chômage des États-Unis. Pourtant les économistes progressifs le blâment de ne pas en faire assez.

Que pourraient-ils bien désirer de plus ? Augmentez l'objectif d'inflation, disent-ils, et tout ira bien. Naturellement, cela représenterait un changement d'orientation radical pour la Réserve Fédérale, qui a travaillé dur pour convaincre le public qu'elle maintiendrait l'inflation autour de 2%. Cette crédibilité a permis à la Réserve Fédérale d'être agressive : il est difficile d'imaginer qu'elle ait pu rétablir son bilan comme elle l'a fait, si l'opinion publique n'avait pas cru pouvoir lui faire confiance sur la question de l'inflation. Pourquoi donc ces économistes veulent-ils que la Réserve Fédérale sacrifie des avancées si chèrement conquises ?

 D'après eux, la réponse se situe dans la cause profonde du fort chômage de longue durée : des taux d'intérêt réels excessivement élevés. Leur logique est simple. Avant que la crise financière n'éclate en 2008, les consommateurs ont maintenu à flot la demande des États-Unis en empruntant massivement sur la hausse des prix du logement. Aujourd'hui ces ménages fortement endettés ne peuvent pas emprunter pour dépenser davantage.

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