May at downing st Jack Taylor/Stringer

Le triple pari de Theresa May

PARIS – Juste après le discours prononcé à Lancaster House par la Première ministre britannique Theresa May, où celle-ci a fixé dans les grandes lignes les objectifs de son gouvernement pour les négociations sur le retrait du Royaume-Uni hors de l’Union européenne, un expert bien connu, commentateur de la vie politique outre-Manche, qui travailla autrefois au 10, Downing Street, me confiait avoir été positivement impressionné. « Vous ne pouvez plus parler, désormais, de la “ perfide Albion ” », m’a-t-il lancé, lorsque nous nous sommes retrouvés dans un club londonien, « Theresa May a été on ne peut plus claire : la sortie des Britanniques – le Brexit – est bel et bien une sortie. »

Mon interlocuteur avait voté au référendum de juin dernier pour le maintien dans l’UE, mais comme beaucoup de ses compatriotes, il a accueilli avec satisfaction le discours de la Première ministre. « S’il vous faut une image pour parler de la Grande-Bretagne d’aujourd’hui, utilisez celle du “ lion conquérant ” », a-t-il poursuivi, avant de m’exposer les trois points de son argumentation.

Pour commencer, m’a-t-il dit, le modèle européen est en crise, et l’UE s’est avérée incapable de se réformer. En quittant le bloc européen par la grande porte et non comme des rats qui fuiraient le navire désemparé, les Britanniques font preuve de réalisme. Il y a toujours eu une forme de malentendu entre le Royaume-Uni et l’Union européenne, parce que le projet d’intégration européenne était présenté comme un projet essentiellement économique alors qu’il était d’abord et par nature un projet politique. Ni le marché unique européen ni la ligne de l’Eurostar qui relie Londres à l’Europe continentale n’ont suffi à transformer les Britanniques en Européens.

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