nye231_Sean GallupGetty Images_ukrainenuclear Sean Gallup/Getty Images

Guerre en Ukraine et prolifération nucléaire

CAMBRIDGE – En 1991, lorsque l'Union soviétique s'est effondrée, l'Ukraine avait hérité une partie de son arsenal nucléaire. Elle a accepté de le restituer à la Russie dans le cadre du Mémorandum de Budapest signé en 1994, en échange de la garantie du respect de sa souveraineté et de ses frontières par la Russie, le Royaume-Uni et les USA. Or en 2014 la Russie a violé de manière éhontée son engagement en annexant la Crimée, et elle a ensuite foulé au pied le Mémorandum en envahissant l'Ukraine le 24 février dernier. Beaucoup d'observateurs en ont conclu que l'Ukraine a commis une erreur fatale en renonçant à son arsenal nucléaire (à l'époque, le troisième du monde). Ont-ils raison ?

Au début des années 1960, le président Kennedy avait prédit que plus de 25 pays auraient la bombe nucléaire lors de la décennie suivante. Mais les choses ne se sont pas passées ainsi ; en 1968, un grand nombre de pays membres de l'ONU ont signé le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires qui restreignait la possession de l'armement nucléaire aux 5 pays qui la détenaient déjà (les USA, l'Union soviétique, la Grande-Bretagne, la France et la Chine). Pourtant ils sont 9 à la posséder aujourd'hui : les 5 pays signataires du Traité de non-prolifération, auxquels s'ajoutent Israël, l'Inde, le Pakistan et la Corée du Nord. Mais il faut aussi compter avec les pays qui sont au seuil de la produire.

Certains analystes pensent que la prolifération pourrait être une bonne chose : un monde de porcs-épics dotés de l'arme nucléaire serait plus stable qu'un monde de loups nucléaires et de lapins désarmés. Selon eux, la Russie n'aurait pas envahi l'Ukraine si elle avait eu l'arme nucléaire. En outre, ils posent une question : pourquoi certains pays auraient le droit de posséder des armes nucléaires, et d'autres non ?

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