Macron foreign policy Steffi Loos/Getty Images

Une doctrine Macron ?

PARIS – En ayant fait de Poutine son premier invité à Paris alors qu’il était probablement le candidat le moins désiré par le Kremlin, en ayant décidé d’inviter Trump à Paris pour le 14 juillet alors que ce dernier espérait la victoire de Marine Le Pen, Emmanuel Macron a symboliquement planté le décor de la nouvelle politique étrangère française : parler à tout le monde sans occulter la réalité des désaccords, rester ferme sur des principes sans négliger la possibilité de compromis nouveaux, profiter des retraits américains et britanniques pour redonner à la France une place centrale dans la diplomatie internationale, le tout sur fond d’ engagement européen.

Macron est convaincu d’une chose. Sans redressement économique la France ne pourra rien. C’est la leçon essentielle qu’il retire du quinquennat de son prédécesseur François Hollande. Parce que celui-ci s’est montré incapable de mener une politique cohérente de redressement, et s’est trouvé dans l’incapacité de changer le regard que le monde portait sur la France. Certes il y a eu le contre-exemple de l’intervention militaire au Mali. Mais c’est un exemple qui malheureusement est resté isolé. Sur le terrain européen qui demeure malgré tout le cœur de la politique française, Hollande n’a obtenu que peu de résultats tout simplement parce qu’il n’était pas assez fort et assez crédible sur le plan intérieur pour pouvoir agir et se fait respecter. Macron pourra-t-il modifier la donne ?

Il est bien évidemment trop tôt pour répondre de manière définitive à cette question. Mais on peut d’ores et déjà identifier un certain nombre d’atouts dont il dispose et dont avait été privé son prédécesseur : un indiscutable charisme, une capacité à tisser des liens personnels avec des dirigeants étrangers notamment parce qu’il maîtrise l’anglais, une connaissance assez grande des enjeux de la globalisation, une volonté de réforme sur le plan économique , enfin une amélioration sensible de la situation économique de la France et de l’Europe. À cela s’ajoute trois réalités internationales majeures qui redonnent un certain espace politique à la France : la forte convergence franco-allemande sur bon nombre de sujets de régulation mondiale, l’affaissement de la Grande-Bretagne qui va se trouver isolée, la politique erratique de Trump , autant d’éléments qui lui permettent de se présenter comme un champion du multilatéralisme tant au regard du commerce international que du changement climatique.  Naturellement la France n’a ni les moyens ni l’ambition de se substituer au leadership américain. Mais il existe une fenêtre pour exercer une influence prépondérante dans la régulation du système international à la fois en parlant à tout le monde et en faisant preuve d’une certaine créativité politique notamment au Conseil de Securité. De ce point de vue, la manière dont Macron aborde Poutine et Trump est assez illustrative de la démarche française.

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