Piratage pour l'humanité

CAMBRIDGE – On connaît cette citation fameuse d'Oscar Wilde : « La vie imite l'Art bien plus que l'Art n'imite la vie ». Dans le cas du film de Sony Pictures The Interview, le monde s'est retrouvé confronté à une nouvelle itération : la vie imitant l'art imitant la vie. La sortie du film a suscité une intrigue internationale, du drame et de sombres luttes de pouvoir géopolitique. Elle a même suscité une intervention solennelle du Président des États-Unis. Tout cela pour une simple affaire de piratage.

Pirater les systèmes d'information n'a rien d'une nouveauté : cela va de pair avec l'apparition des télécommunications. Une des premières attaques s'est produite lors de la démonstration de Guglielmo Marconi durant sa transmission radio en 1903 entre Cornwall et Londres, distante de 300 kilomètres. Nevil Maskelyne, magicien de music-hall et futur magnat de la technologie sans fil, frustré par les brevets de l'inventeur italien, réussit à prendre le contrôle du système, à diffuser des messages obscènes et scandaliser le public de la Royal Institution.

Même si le piratage est aussi ancien que la radio elle-même, beaucoup de choses ont changé depuis l'époque de Marconi. Les réseaux d'information recouvrent désormais notre planète, assurant la collecte et le transfert d'immenses quantités de données en temps réel. Ils permettent de nombreuses activités courantes : les communications instantanées, les médias sociaux, les transactions financières et la gestion logistique. Plus important encore, l'information n'est plus séquestrée dans un monde virtuel, mais imprègne l'environnement dans lequel nous vivons. Les mondes physiques, biologiques et numériques ont commencé à converger, donnant lieu à ce que les scientifiques appellent des « systèmes cyber-physiques ».

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